L’appareil électronique que nous jetons tous et qui renferme 450 milligrammes d’or 22 carats

En bref

• Une vingtaine de cartes électroniques usagées suffisent à extraire près d’un demi-gramme d’or 22 carats
• 50 millions de tonnes de déchets électroniques sont générées chaque année, dont 80 % non recyclés
• Des chercheurs suisses transforment un sous-produit du fromage en procédé d’extraction propre
• Une méthode écologique rivalise désormais avec l’exploitation minière traditionnelle
• Chaque téléphone inutilisé devient un gisement de ressources métalliques secondaires

Le recyclage électronique, nouvel eldorado discret du XXIe siècle

La présence d’or dans les circuits électroniques n’a rien de symbolique : elle est physiquement mesurable et économiquement exploitable. Chaque carte mère usagée, chaque connecteur, chaque puce contient une fraction de ce métal très conducteur et résistant à l’oxydation. Sur environ vingt cartes mères, les quantités cumulées atteignent près de 450 mg d’or 22 carats. L’enjeu dépasse largement l’anecdote : les gisements urbains rivalisent désormais en richesse avec les mines en activité.

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Un paradoxe économique et écologique majeur

Chaque année, près de 50 millions de tonnes de déchets électroniques s’amoncellent à l’échelle mondiale. Ces déchets contiennent des métaux stratégiques comme le cuivre, le palladium, l’argent ou encore l’or. Pourtant, moins de 20 % sont correctement recyclés. Le reste finit incinéré, enfoui, ou exporté dans des pays sans traitement réglementé. Cette situation génère un double paradoxe : une surexploitation minière d’un côté, une perte de valeur colossale de l’autre.

La rentabilité du recyclage, pourtant démontrée, est freinée par des procédés encore trop polluants. Le cyanure, le mercure ou l’acide chlorhydrique sont fréquemment utilisés dans les filières informelles, au mépris des normes environnementales. C’est ici qu’intervient une avancée scientifique inattendue.

Le procédé suisse qui réinvente l’extraction

Une équipe de l’ETH Zurich a développé un système révolutionnaire basé sur un sous-produit de l’industrie fromagère. En récupérant le lactosérum un résidu liquide de la fabrication du fromage les chercheurs ont isolé des protéines capables de former des éponges moléculaires. Ces microstructures piègent sélectivement les ions métalliques dissous, notamment ceux de l’or.

Une fois chargées, les éponges sont chauffées, permettant de récupérer une poudre métallique ultrafine. Le résultat ? Des pépites d’or 22 carats, extraites sans solvant toxique, ni bassin de lixiviation. Cette méthode concilie performance industrielle et sécurité environnementale, à un coût réduit.

Comparativement, les mines traditionnelles génèrent entre 1 à 5 grammes d’or par tonne de roche. Le recyclage électronique monte jusqu’à 400 g par tonne de déchets… mais jusqu’ici, au prix d’une forte pollution. La méthode suisse égalise ces performances tout en réduisant l’empreinte écologique à néant.

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Réinventer le cycle de vie numérique

Ce changement de paradigme ouvre la voie à une économie circulaire des métaux électroniques. Les objets du quotidien deviennent alors de véritables réserves de matériaux critiques. Téléphones, ordinateurs, imprimantes, serveurs… tous recèlent un potentiel de valorisation longtemps négligé.

La chaîne est maîtrisable : collecte ciblée, tri technique, extraction douce, fonte et revalorisation sous forme de lingots ou de composants pour de nouvelles applications. Cette logique décentralisée pourrait réduire la dépendance aux exploitations minières, tout en créant une nouvelle filière industrielle à forte valeur ajoutée.

Ce que l’on percevait hier comme un rebut technique devient une ressource stratégique. Une puce obsolète se transforme en matière première pour la transition énergétique, les semi-conducteurs ou les monnaies refuges.